Cette semaine, un grand dossier sur les cris à la maison. On a tous à un moment ou un autre été poussé dans nos retranchements par nos bambins et fini par hausser le ton. Ce qui n'est au début que l'exception peut vite devenir la règle et transformer la maison en un lieu invivable où les décibels règnent en maitre.
Les beaux principes d'une éducation réussie: une discipline solide dans un gant de velours
Lorsque l'enfant n'existe que dans les projections de notre imaginaire, nous sommes tous de futurs parents pétris d'idéaux. Quoi de plus louable? Peut être avons-nous des amis dont nous avons eu tout le loisir d'observer les principes éducatifs et de les qualifier de douteux. Nous, c'est certain nous n'aurons jamais à aboyer sur nos enfants qui sauront se tenir à table. Une discipline solide dans un gant de velours sera le principe qui, nous en sommes convaincus, orchestrera le merveilleux ballet de notre vie familiale et sera le pendant sans faille d'une vie personnelle et sociable riche à l'équilibre parfait.
Et puis l'enfant parait et l'inévitable et difficile décuplement de soi qu'il requiert à ses soins de jour comme de nuit est un tel chamboulement à toutes les strates de notre vie, que c'est d'abord la mise en place de "stratégies de survie" qui l'emporte sur ces beaux principes d'une éducation réussie. Fini l'idéal, bienvenue dans la réalité des parents fatigués, des nuits pointillées et des mille défis de la parentalité. On arrondit les angles, on ponce ici et là. On survit.
Si ballet il y a au royaume de la parentalité, avec ses incroyables envolées de bonheur et ses moments grisants et parfaits, ce n'est pas sans faux-pas et autres croc-en-jambe qui échappent à la chorégraphie initiale. C'est dans ces moments là que les principes de jadis volent en éclats et nous transfigurent en cet autre, ce parent tant calomnié, l'impatient, le railleur, le râleur, le rabâcheur, le parent hurleur.
Quand tout dérape: "Mais arrêtez de crier comme ça!!!!!" hurla soudain la mère.
Que l'enfant soit unique ou membre d'une fratrie, des circonstances nombreuses et variées font souvent en sorte que le parent arrive à un moment donné à un point de rupture, le point de non retour, celui où soudain sa parentalité se manifeste en vociférations.
C'est le moment où tout dérape, le moment absurde s'il en est où la mère excédée hurle "Mais arrêtez de crier comme ça!!!!!!!!!!!"
Ces cris que le parent ne peut alors plus retenir émanent d'un chaudron où mijotent depuis trop longtemps la colère, la frustration, l'impatience, le stress, la fatigue et peut être bien un petit zeste de solitude parfois.
Quand le chaudron déborde, on se sent tellement démuni(e), frustré(e) et à bout que la seule façon envisageable à ce moment de reprendre le contrôle de la situation est de s'imposer en décibels.
Tout le spectre des émotions éveillées par la situation est alors lissé sous le fil d'une aveuglante colère qui vous fouette les sangs.
On se sent investi d'une mission, celle de l'ordre et de la discipline, et on se pare alors de cris comme si on revêtait une illusoire armure pour notre croisade parentale. Plus le cri est furibond plus on a l'impression de reprendre les rennes, de redresser la barre, d'être ferme et maitre en sa maison.
Et bien sûr, ce n'est qu'illusion...
Les effets et répercussions du "fais ce que je dis, pas ce que je fais."
L'effet pernicieux de la grosse colère hurlée d'un parent furibond, c'est que sur le coup, ça marche. L'effet instantané recherché est atteint. L'enfant écarquille l'oeil, et se plie sous le joug de nos vociférations. Mais à quel prix?
Notre conscience n'est pas longue à nous le dire et cette terreur dans leurs yeux nous hante les idées.
Quelle leçon pour l'enfant lorsque le parent se laisse aller à ce qu'il lui interdit?
Il y a fort à parier que l'effet miroir ne soit pas long à s'installer, et que notre enfant adopte lui aussi ce mode de communication qui hérisse l'épiderme. L'enfant retient que pour faire plier l'autre et afficher la couleur de ses émotions, les cris l'emportent et gagnent, pourquoi ne chercherait-il pas à faire pareil?
Les cris deviennent la toile de fond du chaos qui s'installe et remplace le ballet rêvé en la maisonnée. L'enfant enregistre nos égosillements comme faisant partie du cadre. Nos cris redoublent à mesure que leur illusoire efficacité première s'émousse et que ceux de l'enfant se multiplient. C'est l'escalade.
Crier, c'est donner la colère en héritage à nos enfants et en sortir tous meurtris car comme l'a dit Buddha: "Rester en colère, c'est comme saisir un charbon ardent avec l'intention de le jeter sur quelqu'un, c'est vous qui vous brûlez."
Continuer avec la seconde partie de notre dossier. Comment arrêter de crier sur ses enfants, partie 2