Les-ailes-de-zelie

Aujourd'hui nous donnons la parole à Bénédicte, maman qui a créé l'association Les ailes de Zélie, une association de soutien au deuil périnatal. Elle partage avec nous les circonstances qui l'ont emmenées à créer cette association et de quelle façon elle aide au quotidien les parents qui vivent ce drame.

Quelques mots sur vous

Je m'appelle Bénédicte, j'ai quarante ans, je suis mariée et maman de 6 enfants et mam'ange de Zélie. J'habite dans l'Aisne, dans un petit village qui s'appelle Mondrepuis. J'ai créé l'association "Les ailes de Zélie", une association de soutien au deuil périnatal, après avoir perdu ma fille à 23 semaines de grossesse.

Dans quelles conditions avez-vous perdu votre enfant ?

J'étais enceinte de 23 semaines et 4 jours. Le  Lundi 22 Mars 2010, quand je me suis rendue à la maternité car je ne sentais plus bouger mon bébé depuis la veille, la sage femme m'a dit que nous allions faire une écho de contrôle pour me rassurer. Je me suis installée mais j'étais très stressée, j'avais un mauvais pressentiment. Au fil de l'échographie, j'ai vu le visage de la sage femme se transformer petit à petit. Je lui ai demandé s'il y avait un problème mais elle m'a répondu qu'elle devait appeler sa collègue qui a rapidement eu la même expression sur son visage.

J'ai commencé à m'agiter, j'ai redemandé  "Il y a un problème ?"  et là, la réponse est tombée comme un coup de massue : "Oui, j'ai bien peur que oui, mais le gynécologue doit le confirmer". Il est arrivé entre 2 consultations et m'a dit : "Écoute, ton bébé est mort, le cœur ne bat plus".

Je me suis mise à pleurer, j'ai dû appeler mon mari car j'étais seule là-bas. On m'a fait les examens nécessaires, je suis rentrée chez moi comme anesthésiée pour annoncer le drame à mes enfants et préparer les vêtements pour ma fille car j'accouchais le lendemain. Le 23 mars à 20h00, j'ai accouché de ma petite Zélie, née sans vie.

Comment avez-vous vécu le deuil de votre enfant ?

Les premiers jours on est comme je le disais anesthésiée, on prépare les obsèques, on s'occupe des papiers administratifs. Mais après l'enterrement on se réveille  et on prend conscience que c'est fini, votre bébé est bien mort! Et là, c'est la descente, on survit pour nos enfants, on pleure beaucoup, on se sent seule.

De quelle façon avez-vous été soutenue par votre famille et vos amis ? Y-a-t-il eu des réactions inattendues ?

Mes parents ainsi que mes frères et sœurs ont été un réel soutien, mes parents ont pris en charge mes 5 enfants quand j'ai dû aller accoucher de Zélie. Ils ont été très touchés. Mon papa m'a pris dans ses bras en pleurant, ma sœur qui habitait à 160 km m'a soutenue moralement pendant les 4 jours entre l'accouchement et les obsèques, elle m'appelait plusieurs fois par jour.

Pour parler des réactions inattendues, oui il y en a eu, à commencer par l'anesthésiste qui m'a dit 20 minutes après que j'apprenne le drame que je n'avais pas à me plaindre parce que j'avais déjà 5 enfants alors que d'autres n'en ont pas. Comme si la peine de perdre son enfant variait avec le nombre d'enfants que l'on a déjà. Les voisins n'ont pas fait mieux en disant "il vaut mieux maintenant que plus tard"  ou "tu n'as pas eu le temps de te prendre dans tes bras, car là ça aurait été grave". Pourtant, j'ai bel et bien pris ma fille dans les bras après l'accouchement, je l'ai câlinée, embrassée, etc.

Auprès de qui avez-vous réussi à trouver du support ?

Après l'accouchement, on vous dit de reprendre votre vie comme avant en vous laissant dans la nature. J'ai fini par trouver du réconfort quelques semaines sur un forum où j ai rencontré des mam'anges qui elles aussi avaient dû faire face à la perte d'un bébé à différents stades (pendant la grossesse, à la naissance ou quelques jours ou mois après la naissance). Je me suis rendu compte que je n'étais pas la seule. De ce forum sont nées de belles amitiés qui durent depuis 3 ans maintenant.

Pourquoi avez-vous créé l'association "Les ailes de Zélie" ?

J'ai créé l'association «Les ailes de Zélie» car je me suis rendu compte que près de chez moi aucune association de soutien au deuil périnatal n'existait et au fil du temps, je me suis aperçu que nous étions nombreuses à avoir vécu ce deuil dans la région.


En quoi consiste "Les ailes de Zélie" au quotidien ? 

Notre but premier est de lever le tabou autour du deuil périnatal qui n'est pas souvent pris en considération. Nous nous battons également afin de donner la possibilité aux parents de pouvoir donner à leurs bébés nés sans vie, leur nom de famille, pour qu'ils soient enfin considérés comme des êtres a part entière.
Nous avons mis en place une pétition qui a recueilli 4000 signatures et que nous remettrons à notre député lors de notre fête des anges. Nous travaillons aussi à mettre en place une meilleure formation du personnel soignant pour gérer la prise en charge des parents parce que trop de parents ont de mauvaises experiences sur leur prise en charge.

Nous aimerions aménager des espaces dans les maternités spécialement réservés aux parents venant "d'accueillir" un bébé né sans vie, afin qu'ils n'aient plus à entendre les pleurs d'autres bébés. Nous demandons également une formation spéciale pour un agent dans chaque CAF et CPAM qui sera l'unique interlocuteur pour répondre aux demandes des parents endeuillés concernant leurs droits.
Enfin nous voulons la création de structures d'accueil pour aider les parents dans leurs démarches administratives (aide aux obsèques, etc) et l'intervention d'un psychologue pour recevoir les parents.

Quelles sont les actions que vous menez ?

Nous fournissons la maternité de secteur en layette pour que nos bébés nés sans vie, quelques soit le terme de la grossesse, puissent être habillés dignement et nous allons nous rapprocher d'autres maternités aux alentours. 
Nous menons une campagne de sensibilisation auprès du grand public lors de la journée internationale de sensibilisation au deuil périnatal du 15 octobre. Nous avons également mis en place un groupe de parole qui existe depuis octobre 2012. Et nous organisons notre 2ème fête des anges ce 7 juillet 2013 avec un lacher de ballons en mémoire de nos bébés partis trop tôt.

Combien de personnes appartiennent aujourd'hui à votre association ?

L'association a été fondée en janvier 2012 mais notre page Facebook "Association Les ailes de Zélie" regroupe plus de 1000 membres qui ont connu de près ou de loin ce deuil. Nous comptons 14 membres dans toute la France, en plus des membres du bureau.

Que recherchent les personnes en deuil en se tournant vers vous ? Comment les aidez-vous ?

Les personnes qui se tournent vers nous recherchent du soutien psychologique, venant de personnes qui ont vécu la même situation car elles ne se sentent pas jugées, mais au contraire comprises et en confiance. Elles savent que leurs bébés ne seront pas oubliés et peuvent parler de tous leurs doutes et exprimer leur colère en toute liberté.

Comment peut-on aider votre association à grandir ?

Toute personne souhaitant nous aider est la bienvenue, soit en adhérant pour 10 euros par an, soit en faisant un don, en achetant des produits dérivés de l'association, en partageant notre page facebook, sur twitter @lesailesdezelie. Et si vous connaissez des personnes susceptibles de nous aider par leur soutien grâce à leur notoriété, je suis sûre que notre cause avancerait d'un grand pas.


Un grand merci à Bénédicte pour cette interview.
Nous vous invitons à partager cet article, afin de pouvoir aider, de façon directe ou non, des personnes ayant ce traumatisme. Merci!