La période du post-partum est une période vraiment intense, riche en émotions et difficile pour la maman, le papa et le couple également. On a été accompagné pendant toute la grossesse jusqu'à la naissance, mais une fois le bébé né on se retrouve quasiment seul. Il n'est pas rare de se sentir complèment perdu après l'accouchement tellement les ajustements à faire son nombreux. Mais la bonne nouvelle, c'est qu'il est possible de trouver de l'aide auprès des professionnels.
Voici donc l'interview de Caroline, doula du post-partum, qui nous présente son métier et nous explique de quelle façon elle vient en aide aux nouveaux parents.
Je m'appelle Caroline, j'ai 34 ans et je vis aux Etats-Unis depuis 6 ans. Je suis mariée et j'ai deux enfants, une fille de 4 ans et un fils de 1 an. J'étais psychologue en France et je travaille ici depuis 3 ans en tant que Doula du post-partum et conseillère en allaitement. Je suis actuellement une formation pour devenir "Lactation Consultant" (IBCLC) ou consultante en allaitement, un métier qui est ici très reconnu et sollicité par les jeunes mamans.
Qu'est-ce qu'une doula post partum ?
Les doulas, de naissance et du post-partum, accompagnent la maman au cours de son accouchement et/ou après la naissance. Nous ne sommes pas qualifiées pour pratiquer des soins médicaux ni pour diagnostiquer ou discuter des problèmes d'ordre médical. Il s'agit avant tout d'un accompagnement pratique et émotionnel.
Dans le cas du post-partum, on s'occupe de la maman pour répondre à ses questions, lui montrer comment pratiquer les soins du bébé, l'accompagner dans ses choix et ses réflexions. On s'assure qu'elle a assez à boire et à manger, on lui propose des solutions pour les douleurs liées au début de l'allaitement ou celles des points de sutures, etc. On dit parfois que les doulas maternent la maman, pour qu'elle puisse à son tour assurer son rôle de maman. Il existe des doulas qui travaillent la journée, et d'autres la nuit. Jour ou nuit, on essaie de permettre à la maman de se reposer et de dormir. On peut également l'accompagner dans ses déplacements, on représente pour elle une source d'informations et de ressources.
Quelle est ta formation ?
J'ai suivi une formation validée par le plus gros organisme de formation existant à ce jour dans ce domaine, DONA International. La formation a duré 3 jours, puis j'ai eu à prouver mon expérience auprès de 3 mamans et à recceuillir leurs impressions sur mon travail, ainsi que des lectures et des rédactions. Il faut renouveler son diplôme régulièrement, en justifiant de son expérience et d'une formation continue. La formation actuelle que je suis pour devenir consultante en allaitement se fait avec l'Université de San Diego, elle est beaucoup plus imposante et demande beaucoup d'investissement. Il y a de nombreuses heures de cours réparties sur 8 mois, des devoirs à rendre chaque semaine et 300 heures de pratique que j'effectue en maternité et en centre spécialisé. Le diplôme est reconnu internationalement.
Qu'est-ce que les mamans attendent de toi ?
Souvent, les parents qui attendent un bébé disent qu'ils attendent de moi que je les guide car ils ne se sont jamais (ou rarement) occupés d'enfants. Ils ont le souci de bien faire et espèrent aussi que ma présence leur permettent de vivre une expérience positive et moins stressante, du fait de mon accompagnement lors de cette transition.
À quel niveau interviens-tu ? À quel âge(bébé) ?
Beaucoup de parents m'engagent avant la naissance, j'interviens avant la naissance et pendant les premières semaines après la naissance. Je travaille aussi avec des parents qui me contactent une fois que le bébé est né, et de façon générale j'interviens dans les 12 à 16 premières semaines après la naissance.
De quelle façon ?
Parfois j'interviens de façon régulière, disons 2 à 3 fois par semaine à raison de 3 à 4 heures par visite. Parfois il s'agit d'une visite unique et cela est suffisant. Il y a aussi beaucoup de suivi par email et téléphone, car je reste joignable pour les parents avec lesquels je travaille.
Raconte nous une journée "type"
Il n'y a pas vraiment de journée type. Ce que je fais dépend de l'âge du bébé et des besoins spécifiques de chaque famille. Je dois constamment adapter ma pratique et mes visites en fonction des besoins perçus, en essayant d'anticiper si possible ou de lire entre les lignes, ce qui n'est pas toujours facile mais j'apprends.
Quelles sont les tâches que tu effectues au quotidien ?
J'aide pour les soins du bébé : comment donner les premiers bains, comment couper les ongles, laver le nez, emmailloter (pratique courante ici), apaiser un bébé, etc.
J'aide avec l'allaitement : pratique des différentes positions, comment améliorer la prise du sein pour que ce soit moins douloureux et pour qu'il y ait un meilleur transfert de lait, comment repérer les signes de faim, etc.
J'aide la maman à se reposer et à prendre soin d'elle en lui préparant des 'snacks' ou des repas, en lui faisant des bains de siège pour apaiser les douleurs post-accouchement, en la soutenant moralement. Je l'aide également en lui expliquant les étapes à venir à court terme pour éviter qu'elle ne soit surprise et pour qu'elle soit mieux préparée. Je m'occupe du bébé pendant qu'elle fait une sieste ou prend sa douche, etc.
J'aide le nouveau papa et les autres membres de la famille : en communiquant les recherches et les données actualisées en matière de soins du bébé ou d'allaitement, car cela change souvent. Je leur explique quelles sont les différentes façons d'apaiser le bébé (methodes de portage, etc.) ou de le faire dormir pour que la maman puisse dormir et être un peu soulagée pendant qu'ils s'occupent du bébé . J'explique également au papa ce qui se passe pour la maman et comment la soutenir au mieux en faisant équipe, et en essayant d'organiser l'aide sur place disponible.
Je fais tout cela dans les 4 premières semaines. Quand j'interviens plus tard cela diffère un peu : je donne des explications sur le développement de l'enfant et comment s'adapter à un bébé qui pleure beaucoup par exemple (ce qui est normal ou non) et je tâche de trouver des solutions adaptées pour les mamans qui pourraient souffrir d'anxiété ou de dépression du postpartum.
Qu'est ce tu penses apporter aux mamans ?
Je pense apporter aux jeunes parents une référence et un soutien pendant une période de transition très riche en émotions et en bouleversements, ce qui leur permet de vivre cette période un peu plus sereinement et ainsi de mieux en profiter. C'est une période ou moi-même, pour mon premier enfant, j'aurais eu besoin d'être davantage épaulée et guidée, et j'essaie d'apporter ce dont j'ai manqué aux mamans avec lesquelles je travaille.
Pourquoi recommanderais-tu une doula ? Quels sont les bénéfices d'avoir une doula ?
Je pense qu'engager une doula du postpartum permet d'augmenter les chances de réussir son allaitement, de réduire les risques d'anxiété et de dépression du postpartum, et de réduire ou minimiser les diffcultés au niveau du couple.
Avec combien de bébé as-tu travaillé depuis ?
J'ai travaillé avec 72 bébés et familles lors de ces 3-4 dernieres années. A cela s'ajoute la centaine de bébés que j'ai pu rencontrer et observer lors de mes stages en maternité et de suivi externe, au cours de ma formation actuelle.
À quels problèmes sont souvent confrontés les mamans avec qui tu travailles ?
La mise en route de l'allaitement, le sommeil et les pleurs du bébé. Elles ont également besoin de savoir comment s'occuper d'un nouveau né, le comprendre, comment réorganiser sa vie de couple, comment gérer les difficultés familiales ou personnelles du passé qui remontent parfois a la surface lors de cette période.
Quel est le problème que tu résouds le plus souvent ?
Le manque de confiance est le principal problème que je rencontre. Je les aide à avoir confiance en elles en leur apprenant les bases pour qu'elles se sentent capables de faire face à la situation.
Comment débloques-tu la situation ?Quel conseil tu donnerais aux mamans en difficulté ?
Je recommande de trouver des groupes de mamans et de se rapprocher d'autres mamans ayant des bébés du même âge, car il est souvent rassurant de voir ce que les bébés des autres font au meme âge, comment élaborer et trouver des solutions pour surmonter des difficultés. Je préconise de sortir et marcher pour éviter l'isolement et l'enfermement, qui amène parfois les mamans à s'interroger sur leurs pratiques ou leur bébé à outrance, et finalement par rendre anxieuse.
Et pour les mamans qui n'ont pas les moyens d'être suivies par une doula du post-partum, quel est le meilleur conseil que tu leur donnerais ?
Je recommande de demander à des amis ou de la famille de venir pour garder le bébé 1 à 2h pendant que la maman va faire une sieste, sort faire un tour ou trouve le moyen de faire quelque chose pour elle. Cela peut également permettre au couple d'avoir un petit moment rien qu'à lui. Souvent lorsqu'on a de la visite, on n'ose pas demander aux gens de faire quelque chose et on se sent obligés de faire la conversation... alors que les gens sont souvent ravis d'être utilisés de façon efficace.