Quand on tombe enceinte pour la première fois, on pense tout de suite au petit bébé qui naîtra dans 9 mois, à la grossesse elle-même. On s'imagine enceinte, avec un bidon tout rond, on pense à tous ces moments de bonheur, à notre vie qui va changer. On est heureux tout simplement et on ne s'imagine pas une seconde que tout peut basculer.
Aujourd'hui nous donnons la parole à une maman qui a souhaité rester anonyme. Elle nous raconte comment elle a appris qu'elle faisait une fausse couche alors qu'elle vivait sa première grossesse et comment les événements se sont enchainés ensuite.
Dans quel état d'esprit étiez-vous quand vous avez appris que vous étiez enceinte ?
C'était ma toute première grossesse, j'avais 28, je suis tombée enceinte au bout du 1er cycle. Je me souviens de la joie et de l'émotion quand le test est devenu positif. Il y avait écrit "enceinte", c'était un test de grossesse ClearBlue. Dans ma tête, j'ai tout de suite commencé à me projeter, dans 9 mois, j'allais être maman d'un petit bébé.
Avez-eu le temps d'annoncer votre grossesse à vos proches ?
Je n'ai pas tardé pour l'annoncer à mes proches. J'étais à 3sa quand je l'ai annoncé, j'avais du mal à garder cela pour moi. Je l'ai donc annoncé à mes copines proches, ma belle-famille et biensûr ma famille. Je l'ai dit à mes parents, mes frères et soeurs. Ils étaient tous très contents. Ma mère m'a tout de même mise en garde en me disant que c'était un peu tôt et que c'était mieux d'attendre pour continuer de l'annoncer à tout le monde parce que le risque de fausse couche n'avait pas été écarté. Je la trouvais un peu négative de penser à ce genre de choses alors que j'annonçais une bonne nouvelle. Je lui ai dit que ça ne m'arriverait pas de toute façon, parce que pour moi les fausses couches n'arrivaient qu'aux autres. D'ailleurs avant d'être enceinte, j'avais très peu entendu parler de fausses couches, donc la remarque de ma maman m'était un peu passée au dessus.
Avez-vous eu l'occasion de faire une échographie ?
À 6sa j'ai rencontré mon bébé pour la première fois au moment de ma première échographie. J'ai pu entendre son coeur battre pour la première fois. C'était une émotion intense d'entendre la vie qu'il y avait en moi. Tout allait bien. Le gynéco a pu dater la grossesse, prendre les mesures et tout. Tout était normal. Moi j'étais heureuse, ma grossesse était concrète. La seule chose de particulière, c'est que les mesures disaient que j'étais enceinte de 6sa et 1 jour, alors que d'après mes calculs, je devais être enceinte de 6sa et 5 jours. Il y avait donc une différence de 4 jours.
À quel moment est-ce que tout a basculé ?
Le weekend qui a suivi l'échographie, j'ai eu quelques traces de sang dans mes pertes. Rien de vraiment alarmant puisque j'avais lu qu'on pouvait saigner pendant sa grossesse, mais des traces de sang quand même. Le lundi matin, pour me rassurer, je suis allée voir mon gynéco, histoire de me rassurer et de voir que tout était bien en place.
Quand et comment avez-vous su que vous faisiez une fausse couche ?
C'est au moment de l'échographie que j'ai pu lire sur visage de mon gynécologue que quelque chose n'allait pas. Son visage était crispé. Il n'y avait plus de battements de coeur, alors que le vendredi qui précédait j'entendais le petit coeur de mon bébé pour la première fois. Il n'y avait plus aucun battement.
Comment avez-vous réagi ?
J'étais dévastée. Certes, ma grossesse en était encore à ses débuts, mais j'étais dévastée. Je perdais "quelqu'un" que je n'avais même pas eu le temps de connaître. J'avais l'impression que mon monde s'effondrait du jour au lendemain. J'avais l'impression que la vie m'en voulait.
J'ai tout de suite pensé à ce que m'avait dit ma mère...Et moi qui avais dit que ça ne m'arriverait pas...
Je me sentais vraiment mal, je ne portais plus la vie mais la mort. C'était vraiment glauque. J'ai beaucoup pleuré.
Bizarrement, j'ai également pensé à toutes les personnes à qui j'avais annoncées que j'étais enceinte, au fait que je devais leur dire que c'était fini, au fait que finalement je devais rendre "des comptes". Devoir gérer les "gens" me mettait vraiment mal à l'aise.
Aviez-vous déjà entendu parler de fausses couches avant ?
Vaguement. Je ne savais pas que les fausses couches étaient aussi courantes. Je me suis tournée vers les forums et c'est là que j'ai découvert que de nombreuses femmes faisaient des fausses couches, que c'était très très courant. J'étais choqués de voir que certaines faisaient également des fausses couches plus tard dans leur grossesse, à par exemple 5 mois. J'avais l'impression de découvrir tout un nouveau monde (celui des fausses couches) dont on m'avait caché l'existence.
Qu'est-ce qui s'est passé ensuite ?
Mon gynécologue m'avait donné le choix entre prendre des médicaments pour évacuer naturellement la grossesse ou effectuer un curetage. Il m'avait expliqué qu'avec les médicaments, des fois ça ne marchait pas et que dans ce cas là, il fallait faire un curetage. J'ai donc "choisi" le curetage pour en finir une bonne fois pour toute. Je ne voulais pas que ça traine.
Comment s'est déroulé votre curetage ?
Mon curetage a eu lieu le mardi qui a suivi. Au moment du remplissage des formalités, il y avait une décharge à signer qui me prévenait des risques encourus par ce type d'opération à savoir : stérilité, perforation de l'utérus, hémorragie, et plein d'autres choses encore. Je peux vous dire qu'à ce moment là, j'avais juste envie de faire demi tour, tellement ça fout la frousse. Psychologiquement, je touchais le fond.
Mon curetage s'est déroulé sous une anesthésie locale. Une demi heure avant l'opération, on m'a donné des médicaments pour me shooter et des antibiotiques contre les infections. J'étais en larmes, j'avais peur. Les médicaments ont fait effet au bout de 15 minutes. On est ensuite venu me chercher pour m'emmener dans la salle où allait avoir lieu le curetage. J'avais la chance de pouvoir rester avec mon homme tout au long de l'opération. Là-bas, on m'a donné un médicament par intraveineuse qui était censé me rendre complètement grogui. Puis le médecin m'a expliqué pas à pas ce qu'il faisait, au moment où il le faisait. Il m'a d'abord fait une anesthésie locale, au niveau du col de l'utérus. Puis il a introduit une fine canule dans l'utérus en passant par le col. Une seringue fixée à la canule a permis d'aspirer le contenu de l'utérus, c'est-à-dire le sac et l'embryon.
Dans ma tête c'était comme un avortement et cette idée me perturbait parce que je me suis toujours dit que je n'avorterai jamais. J'avais l'impression de subir un avortement forcé, en quelque sorte.
L'opération n'a duré que 5 minutes à peine. C'était douloureux, ça ressemblait aux douleurs des règles. Je n'oublierai pas le bruit de fond qu'il y avait, comme un bruit d'aspirateur.
J'ai pleuré pendant toute l'opération.
Et l'après curetage ?
J'ai saigné pendant près d'une semaine. J'ai eu de grosses douleurs de règles tout au long et j'ai perdu beaucoup de sang, des gros "caillaux" de sang. C'était vraiment une période difficile et douloureuse, physiquement et psychologiquement, heureusement que j'étais bien entourée.
Je revenais à la case départ, comme si rien ne s'était passé. Il fallait tout recommencer.
Mon gynéco m'a expliqué que mes règles devaient revenir dans les 4 à 6 semaines et que je devais laisser passer 2 cycles avant de réessayer de tomber enceinte. J'étais impatiente d'y être.
Combien de temps avez-vous mis pour retomber enceinte ?
2 mois. Mes règles sont revenues, et après les 2 mois d'attente, j'ai repris les essais. J'avais peur que tomber enceinte soit compliqué, ça avait été tellement simple la première fois. Je me disais que j'allais peut-être mettre plusieurs mois pour retomber enceinte. Mais au bout du 2ème mois d'essai, j'étais enceinte de nouveau!
Et comment s'est passé cette nouvelle grossesse ?
Ma grossesse s'est très bien déroulé au niveau médical. Aucun problème, ni pour moi ni pour le bébé.
Par contre au niveau psychologique, ça a été vraiment difficile, j'avais tout le temps peur que cela s'arrête, j'avais besoin d'être rassurée constamment. Je paniquais pour un rien, pour des virages sur la routes, des bosses sur la route, etc. J'appelais souvent mon gynécologue en prétextant quelque chose pour avoir une échographie histoire d'être rassurée. Je me suis même mise en mode alitée alors que tout allait bien, je m'économisais à fond. Et ça a duré comme ça toute la grossesse. C'était pénible psychologiquement, ces questions en permanence dans ma tête, ces peurs de perdre mon bébé.
Mais tout s'est bien fini.
Et aujourd'hui, avez-vous toujours la fausse couche en tête ?
Depuis j'ai eu d'autres enfants et tout s'est bien passé aussi. La peur de la fausse couche a été moins présente mais toujours là dans un coin de ma tête. Je n'ai jamais vraiment été libre dans ma tête et je pense que je ne le serai jamais. Même si ma fausse couche est loin derrière, elle a causé un énorme traumatisme et je n'oublierai jamais.
Quelques mots pour les mamans qui ont vécu une fausse couche ?
J'ai la chance dans mon malheur d'avoir fait une fausse couche très tôt. J'ai du mal à imaginer une fausse couche plus tard. Le seul conseil que je pourrai donner, c'est qu'il faut aller de l'avant. Porter la vie et donner la vie est formidable et si certaines choses se mettent en plein milieu, il faut se battre, aller de l'avant, avancer. On est plus forte qu'on ne le pense.
Aussi j'aimerai ajouter qu'il faut à tout pris comprendre que nous ne sommes pas responsables des fausses couches. Quand j'ai fait ma fausse couche, j'ai culpabilisé, je me suis dit que j'avais peut-être fait quelque de mal. Mais non. Et c'est pareil pour toutes les femmes. Les fausses couches surviennent en général naturellement et les mamans n'en sont pas responsables. Donc ne culpabilisez pas, ce n'est pas de votre faute!
Merci à cette maman de s'être confiée à nous!
Des questions relative au sujet de la fausse couche et du curetage sont également disponibles :
Comment se déroule un curetage ?
Combien de temps après une fausse couche peut-on retomber enceinte ?