Naissance de barbouille
La veille, nous sommes invité Papoune, Bébinou, mes parents et moi à manger une bonne fondue suisse chez nos voisins et amis, Sandra et Yohan. On est samedi 13 novembre. La soirée se passe impec, bébinou joue seul dans son coin avec les jouets de leur fille de 9 mois, l'ambiance est à la déconnade et à l'indigestion de fromage.
Vers 22h, je commence à avoir mal au ventre, pas vraiment mal d'ailleurs, c'est plutot comme une gêne que j'attribue immédiatement au copieux repas que je viens d'engloutir ! 1h après, ça ne passe toujours pas. J'hésite à aller aux toilettes chez eux ou bien carrément rentrer chez moi, Papoune se fout de moi car d'ordinaire je fais moins de "manières".
A la fin du repas, ayant toujours mal au ventre par vagues, je sors mon Iphone car "il y a aussi une application pour ça". A savoir une application nommée "Baby Bump" que j'ai acheté en début de grossesse et qui est en fait un suivi très sympa, semaine après semaine, de la grossesse. En annexe il y a aussi un compteur de coups de pied et également un compteur de contraction. Ce dernier permet de les chronométrer, de savoir combien de temps elles durent et l'écart entre chaque. Mon père se fout bien de moi d'ailleurs !
On rentre chez nous et c'est parti pour 1h de chronométrage intensif. Le problème est qu'elles ne sont pas très fortes et que j'ai encore du mal à dire si ce sont des contractions ou non. Quand la douleur revient toutes les 3 min je me demande si on devrait pas partir à la mat'. Je suis un peu perdue car si elles sont rapprochées, elles ne sont pas intenses et surtout elles durent trop peu de temps pour être efficaces, à savoir 30sec au maximum.
En allant aux toilettes je constate que j'ai perdu un peu de sang, ce qui ne me rassure pas du tout ! Voyant que je panique un peu mon chéri me dit qu'on y va, au pire ils me feront un petit monito et dans 2h on sera rentré (on habite à 3 min en voiture de la mat). On se prend une petite douche en se disant que peut être la nuit sera loooongue et là Papoune commence à regretter d'avoir arrosé la soirée, pas grave car il va désaoulé bien vite !
Je commence à avoir les jambes qui flagellent, l'exitation du moment peut être... Papoune charge les affaires, un petit bisous à mes parents et hop nous voilà en chemin...
Dans la voiture je n'ai plus de doute possible, ce sont bien des contractions. J'espère juste que ce sont de "vraies" contractions de travail et pas un faux-départ. Il est minuit lorsque nous arrivons aux urgences de nuit. Je suis accueilli par une sage-femme et ... UN élève sage-femme ! Nous n'avons aucun à priori sur le fait d'être pris en charge par un homme ou une femme, c'est juste très surprenant ! Sauf que quand un homme avec ses grosses paluches vous examine, forcément la dilatation parait moins avancée ! Résultat: 10 min plus tard, alors que je suis sûre d'en être au moins à 3 vu la douleur... j'en suis à .... un petit 1 !!!!
Là j'hallucine, être dilatée à 1 ne veut pas dire grand chose, il y a des tas de femmes qui sont dilatées à 1 pendant des semaines avant leur accouchement. Je suis déçue d'être aussi douillette, moi qui avait prévu d'arriver à la mat en étant déjà à la moitié du travail au moins c'est rapé ! La sage-femme hésite à me renvoyer chez moi car elle voit bien que j'ai mal, elle me propose de me laisser sous monito et de revenir m'examiner d'ici 1h.
Nous voilà seuls en salle d'accouchement, même pas en salle de pré-travail. J'ai les sondes du monito placées sur le ventre et je dois rester allongée. Papoune est déçu de ne pas pouvoir m'aider à soulager mes contractions en faisant tout ces trucs qu'on a appris en haptonomie car pour cela il faudrait que je soit debout, sinon au moins assise. Heureusement mon Iphone diffuse une douce musique d'ambiance et on a éteind les spots principaux pour adoucir les lumières. Ca nous fait un peu oublier la froideur de la salle et les bips bips incessants du monito.
1 h plus tard nouvel examen : j'en suis à 2 d'après l'élève et un petit 3 d'après la sf ( mettez-vous d'accord svp ! ). Et j'ai toujours mal ! Je me déteste !! On me propose alors un bon bain histoire de me détendre et de faire avancer un peu les choses. Papoune et moi nous retrouvons donc dans une jolie petite pièce décorée avec soin où trône une énorme baignoire de balnéothérapie, le pied. Je met l'eau assez chaude pour atténuer la douleur et commence à me relaxer. Je respire bien pendant les contractions, les accompagnant plutot que luttant contre. L'Iphone diffuse toujours de la musique zen. Jérome est à mes côtés et m'accompagne pendant les contractions.
On est bien, on discute entre les contractions, l'ambiance est sympa. Sauf quand je dis à Papoune que comme j'ai vraiment mal, je ne vais pas tarder à demander la péridurale. Ce qu'il prend assez mal car cela voudra dire que je serais sctotchée à mon lit et qu'on ne pourra plus mettre en pratique les différentes techniques d'accompagnement de la douleur vues pendant les cours d'hapto ! Il a peur de se sentir inutile en somme. Là je me retiens pour ne pas l'evoyer promener, et méchamment en plus, car je douille pas mal et qu'à l'instant t je me fous de ses états d'âme !! J'ai un peu envie de lui dire que c'est moi qui bosse et qui encaisse et que par conséquent c'est un peu moi qui choisit !
On reste au moins 1h30 dans l'eau. Je gère trop bien et suis fière de moi, j'ai l'impression que le travail a bien avancé. On sort de l'eau et retournons dans la salle travail. On en profite que je ne soit pas branchée au monito pour rester un peu debout. Pendant une contraction Papoune se met dos au mur et moi dos à lui et nous respirons ensemble pour accompagner et soulager la douleur. L'élève entre pour m'examiner encore et nous jète un regard bizarre. Super il nous prend pour des illuminés !! Visiblement l'haptonomie ne fait pas vraiment parti du cursus scolaire des sage-femmes !
Re-examen et re-déception, je suis dilatée à un petit 4 ( seulement ???!!! )
N'écoutant que mon courage ( hum hum ), je demande la péri. 30 min plus tard débarque l'anesthésiste avec tout son attirail. On fait sortir Papoune pendant la piqure, je suis extrêmement nerveuse car j'ai très peur des aiguilles en général. Et au moment où l'anesthésiste envoie le produit, je sens que quelque chose cloche. Je ne ressens pas du tout les mêmes sensations que lors de ma première péridurale il y 3 ans. Et pour cause, la péri ne fait effet que d'un coté !! J'ai tout mon coté droit complètement endormi et le gauche quasi pas. Je ressens toujours les contractions au niveau du ventre, dans sa partie gauche.
Là commence une loongue traversée du désert où il n'y a rien a faire sinon attendre. Je dis à Papoune d'aller dormir un peu puisque notre Numéro bis ne semble pas préssé d'arriver. Comme les chambres sont individuelles et que la mienne est déjà prête, il y monte pour se reposer.
Les heures défilent lentement... 3h...4h..5h...... Papoune est revenu entre temps mais je ne sais plus quand. Il est crevé mais tellement excité par l'arrivée de notre bébé qu'il n'a pas réussi à dormir du tout ! On m'examine toutes les heures environs et je grapille quelques mm de dilatation de temps à autres. Je ne fais pas grand-chose à part écouter ma musique, respirer pendant les contractions qui même si elles sont moins fortes grâce à la péridurale, sont bien présentes coté gauche !
J'en ai marre d'être attachée de partout ! J'ai un bip sur le doigt et une sonde sur mon ventre pour le monito, un goutte à goutte dans le bras droit, un autre pour la péridurale sur ma gauche qui va jusque dans mon dos, et un brassard sur mon bras gauche qui se gonfle toutes les20 min environ pour prendre ma tension. On est trèèèès loin de l'accouchement zen et peu médicalisé que nous souhaitions. Je commence même à angoisser un peu en me disant qu'il y forcément un problème pour que je sois surveillée à ce point !
7h30 : La relève. La sage-femme qui vient de prendre son service fait son ptit tour de présentation et me demande comment je me sens. Je lui explique que c'est mon 2 e et que je pensais que cela irait plus vite que ça ! Je trouve cette phase de travail looooooongue ! Elle me rassure puis me propose de me tourner un peu sur le coté, que parfois cela "décoince" le bébé et qu'il se présente mieux pour la sortie. Papoune m'aide et nous nous exécutons. Et effectivement je sens qu'il se passe quelque chose, les contractions reprennent très fortes au niveau du périné et presque plus au niveau du ventre. Je commence à douiller grave mais ce n'est rien comparé à ce qui m'attend...
8h. La sf revient et me demande si ça va mieux. Disons qu'au moins je sens que ça bosse bien là dedans. Je me remet sur le dos pour qu'elle controle l'avancée de la chose ( la "chose" étant Numéro bis, bien sûr ! ) . Je n'en suis qu'à 6,5 cm. Donc je suis passée de 1 à 6,5 en 8h de temps, je pense pouvoir battre mon record perso d'accouchement le plus long !
Vient maintenant l'heure la plus intense et douloureuse de toute ma vie ! Je ressens chaque contraction, la péridurale n'a aucun effet sur ces contractions que je ressens très bas, vraiment au niveau du périnée. A chaque nouvelle vague de douleur, je sers très fort la main de Papoune dans la mienne. Je souffle et reste hyper concentrée pendant les contractions, entre deux je chiale tellement j'ai mal, je ne me rappelle pas avoir autant souffert pour Bébinou et me sens trahi par ma propre mémoire ! L'envie de pousser me saisi mais je la retiens car je pense ne pas être encore assez dilatée.
Papoune est présent, attentif et dispo. Il m'aide en me parlant, m'ammène au fil des mots à m'enfermer dans ma bulle pour supporter la douleur. Comme chaque muscle de mon corps est pris de tremblements incontrolables, je fais des sons graves en chantant, des sortes de "oooommm" comme on entend dans les chants traditionnels indiens, pour essayer de me décrisper. Je ne le fais pas vraiment consciemment, je ne ne suis d'ailleurs plus vraiment là, plus vraiment moi-même et j'y vais à l'instinct.
Quans la sf revient 45 min après elle me trouve dans un drôle d'état et decide qu'on peut commencer la phase d'expulsion. Papoune lui dit "c'est maintenant que le travail commence". Ce qui lui vaut un mauvais regard de la part de la sf et de la puéricultrice qui lui demande s'il a l'impression que depuis le début je me reposais ? S'il a dit ça c'est parce qu'il se souvenait que je lui avait raconter que pour Bébinou, la phase d'expulsion m'avait semblé interminable ! Le pauvre s'est fait rembarré alors qu'il voulait juste dire que le plus dur restait à faire !
Je met à peine les pieds sur les étriers qu'on m'annonce qu'on voit déjà la tête de mon bébé ! Je suis passé de 6,5 cm à 10 cm en 45 min, tu m'étonnes que j'ai eu mal !
Une nouvelle contraction survient et je donne tout ce que j'ai. Je pousse si fort que j'en deviens violette. Je crie un grand coup sur la fin, pensant avoir bien fait descendre mon bébé et m'apprête à repousser un coup quand elle me dise que ça y est, mon bébé est sorti ! Quoi, déjà ? Dans l'intensité du moment j'ai du mal à compredre ce qu'il se passe. Je suis encore dans ma gestion de la douleur et j'ai peine à saisir ce qui m'entoure. C'est pas possible, mon bébé ne peut pas déjà être sorti ??!! Je n'ai poussé qu'une fois ( bon une bonne grosse fois c'est vrai, mais tout de même ! )
On me dit "c'est une fille". Je regarde mon homme et on éclate en pleurs ensemble. Je demande "vous êtes sûrs", question débile, des fois que son zizi ne se soit planqué dans la raie des fesses !
Oui oui c'est bien une fille. Papoune coupe le cordon, on est hyper émue. Tout s'est fini si vite. Il est 9h04. Nous donnons son prénom à la puéricultrice. Puis pendant que la puéricultrice l'examine et que Papoune lui parle comme nous l'avait recommandé la sf pendant les cours d'hapto, la sf qui vient de m'accoucher m'annonce qu'il n'y a aucun dommage collatéral ! Même pas une petite déchirure, rien !
Elle me dit aussi que parmi les 3 femmes présentes pour accoucher, c'est moi qui ai "gagné" alors que j'étais donnée bonne dernière vu l'avancement de mon travail. Je remercie chaleureusement la sf de m'avoir aidé à me retourner sur le coté 1h avant, je suis persuadée que c'est ce qui a débloqué mon bébé et l'a fait descendre plus vite.
C'est une petite crevette de 2,860 Kg pour 48 cm. Elle est en bonne santé, tout va bien. J'appelle ma maman en pleur qui pleure aussi au téléphone, puis c'est au tour de Papoune d'appeler ses parents. Enfin nous nous retrouvons tous les 3 seuls pour faire connaissance.
Barbouille ouvre de grand yeux et nous la dévorons du regard...


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